Qu’est-ce que le BRF ?
Le terme BRF signifie Bois Raméal Fragmenté. “Raméal” fait référence aux rameaux : On parle ici des branches jeunes, d’un diamètre inférieur à 7 cm, encore souples et riches en nutriments. Une fois broyées, elles se transforment en un broyat à la fois nourrissant et protecteur pour le sol.
- Une histoire qui vient de l’autre côté de l’Atlantique… Cette méthode a été popularisée au Québec dans les années 1970-1980, portée par des chercheurs de l’Université Laval. Si son usage s’est rapidement répandu en Amérique du Nord, Il à fallut attendre plus longtemps pour le voir arriver par chez nous !
Principes de fonctionnement du BRF
Le principe est de récupérer des branches de l’année ou de deux ans, car ces dernières renferment des fibres ligneuses riches en cellulose, hémicellulose et un peu de lignine, qui se dégradent facilement. Contrairement au bois plus vieux (aux branches plus âgées) qui, s’il était broyé, mettrait beaucoup plus de temps à se décomposer.
- Un peu de chimie : Une fois broyées, ces particules de bois se retrouvent sur le sol et, par leur forme, offrent beaucoup de surface de contact avec les microorganismes (bactéries, champignons, actinomycètes). Ces derniers vont consommer la cellulose, l’hémicellulose et la lignine pour leur survie.
C’est là qu’intervient la magie ! La cellulose devient... des cellulases, l’hémicellulose devient... des hémicellulases, et la lignine... des ligninases ! Comme ça, c’est vrai qu’on a juste l’impression d’avoir changé la terminaison de -ose en -ase, mais c’est bien plus que ça. Cette étape s’appelle la transformation enzymatique, et c’est magique, car ces éléments deviennent des nutriments assimilables pour les plantes !
Au fur et à mesure de la décomposition, les éléments nutritifs (azote, phosphore, potassium, oligo-éléments) contenus dans le bois deviennent disponibles pour les plantes.
- À savoir : Au début de ce processus, il faut comprendre que la décomposition induit une immobilisation temporaire de l’azote en raison d’un rapport carbone/azote élevé. Pour le dire plus simplement, la décomposition elle-même, au démarrage du processus, consomme de l’azote, qui n’est alors pas disponible pour les plantes. On appelle ça la faim d’azote.
C’est pourquoi, lors de l’installation du BRF, il est nécessaire d’attendre cette étape avant d’introduire des plantes dans le sol.
Les Avantages du brf
- Amélioration de la porosité et de la rétention d’eau : L’ajout de BRF aide sérieusement à aérer le sol et à améliorer sa capacité de rétention d’eau. La décomposition progressive crée une structure poreuse qui facilite la circulation de l’eau et de l’air. Ça paraît rien, mais ça favorise un bon enracinement et ça crée un milieu propice à l’épanouissement des microorganismes du sol.
- Formation d’humus : La décomposition conduit à la formation d’humus, une matière organique stable qui est essentielle pour la rétention des nutriments et l’amélioration de la structure du sol sur le long terme.
- Interactions symbiotiques : L’ajout de matière organique dans le sol et l’activation de la vie microbienne favorisent le développement des mycorhizes?. Ces champignons forment une association bénéfique avec les racines des plantes, améliorant ainsi l’absorption des nutriments et renforçant leur résistance aux conditions difficiles (sécheresse, froid, sols pauvres, etc.).
Effets à moyen et long terme
- Régénération et fertilité durable : Au-delà de l’amélioration immédiate de la structure du sol et de la disponibilité des nutriments, le BRF favorise une fertilité durable en créant un cycle continu de matière organique qui enrichit progressivement le sol.
- Séquestration du carbone : La transformation du carbone organique en humus contribue également à la séquestration du carbone dans le sol, jouant ainsi un rôle dans l’atténuation des changements climatiques.
Le BRF fonctionne sur les sols en introduisant une matière organique facilement dégradable qui stimule l’activité microbienne et améliore la structure physique du sol. Ce processus, à la fois biochimique et physique, conduit à une meilleure disponibilité des nutriments, une amélioration de la rétention d’eau, et favorise des interactions bénéfiques entre les microorganismes et les plantes, aboutissant à une fertilité et une résilience accrues du sol.

Comment préparer et utiliser le BRF ?
- Ramassez les bonnes branches : privilégiez celles de diamètre inférieur à 7 cm, issues d’arbres sains et non traités chimiquement. Méfiez-vous du broyat issu des parcs publics, car certains employés municipaux ont parfois la main lourde sur les produits !
- Broyez : utilisez un broyeur pour obtenir des copeaux (entre 1 et 5 cm de long).
- Étalez : disposez une couche de 3 à 5 cm sur la surface à enrichir (massifs, potager, autour des arbres fruitiers, etc.).
- Incorporez légèrement : travaillez-les juste en surface (quelques centimètres) pour stimuler l’action des champignons et bactéries.
- Arrosez : une bonne humidification facilite la décomposition des copeaux. Si vous avez un ancien purin? qui traîne, ça peut vraiment accélérer le processus !
À quelle période étaler le BRF ?
- Au printemps : mais il faudra préparer le terrain avant les semis.
- À l’automne : profitez de la taille des arbres pour produire du BRF et laissez la nature travailler pendant l’hiver.
Les super-pouvoirs du BRF… et ses petits défauts
Les plus :
- Un bon amendement : la libération progressive des nutriments nourrit les plantes pendant plusieurs saisons.
- Moins d’arrosage : le sol, enrichi en humus, retient mieux l’eau.
- Biodiversité : la faune du sol se développe.
- Stockage de carbone : en se décomposant, le bois piège du carbone dans le sol.
Les moins :
- Faim d’azote : si le BRF est très frais, il peut temporairement "voler" l’azote nécessaire aux plantes. Une astuce : ajouter un peu de compost ou de fumier.
- Acidification : la décomposition peut rendre le sol plus acide. Surveillez le pH et, si besoin, apportez de la chaux, des cendres ou de la dolomite pour rééquilibrer.
Pour en savoir plus :
- “Nitrogen Immobilization and Release in Soils Amended with Organic Residues” (Soil Science Society of America Journal, 2017)
- “Soil pH Changes Following Application of Wood Chips” (Journal of Environmental Quality, 2016)
Perfectionner la technique : les petites astuces
- Mélanger les essences : en variant les types d’arbres (feuillus, résineux en petite proportion), on obtient un meilleur équilibre de nutriments. Certaines essences, comme le bouleau, le sureau et le genêt, se décomposent rapidement, tandis que le chêne ou le châtaignier, riches en tanins, mettent plus de temps à se dégrader.
- Complément en azote : si vous craignez la faim d’azote, ajoutez un engrais organique (compost, fumier, engrais vert). Un arrosage avec un purin dilué à 10 % lors de l’installation aide bien aussi.
- Précompostage : laissez le BRF "mûrir" quelques semaines avant son incorporation pour lancer la fermentation.
- Surveiller le pH : un petit test du sol de temps en temps permet de repérer une acidification.
De notre côté, nous utilisons beaucoup le BRF. En hiver, nous faisons des tas que nous mélangeons avec du fumier de poules de notre voisine, qui bosse en bio aussi (hyper important, car il ne faudrait pas retrouver d’antibiotiques dans le fumier !). Nous laissons mûrir tout ça jusqu’au printemps, puis nous le déposons en surface sur nos sols. Parfois, nous attendons l’automne suivant pour l’incorporer, et après un an de compostage, le BRF mélangé au fumier de poule se transforme en un amendement noir, qui sent très bon… et qui fait même parfois pousser des champignons !6. Le BRF mis en pratique : retours d’expérience
- D’après une étude réalisée en France (voir “European Journal of Agronomy”, 2021), l’apport de BRF sur des cultures de légumes a augmenté le rendement de près de 20 %, avec une réduction de 30 % de la consommation d’eau. Les vers de terre s’y sont installés en masse, contribuant à aérer et restructurer la terre.
- De petits maraîchers en permaculture utilisent aussi le BRF en synergie avec d’autres techniques (paillage, rotations de cultures, semis d’engrais verts). Résultat : des potagers plus sains, plus productifs, et des sols riches en humus pour longtemps.
Le BRF, un geste écolo !
Avec le BRF, on réduit les déchets verts (plutôt que de brûler les branches, on les valorise !), on n’a pas besoin d’engrais chimiques et on contribue à séquestrer du carbone dans le sol. C’est un pas de plus vers une agriculture plus durable et une biodiversité foisonnante. Dans ce cercle vertueux, on donne de la vitalité à la terre, et elle nous le rend en offrant des récoltes généreuses et savoureuses.
En guise de conclusion...
En résumé, le Bois Raméal Fragmenté est une technique simple et efficace pour fertiliser le sol et limiter l’apport de fertilisants d’origine animale. Comme tout procédé écologique, il demande un peu de patience et d’observation.
Alors, prêt·e à nourrir le sol et la biodiversité ? Armez-vous d’un broyeur, offrez un beau paillis de copeaux à votre jardin et laissez la magie du vivant opérer !
Quelques références pour aller plus loin
- Un site génial qui répertorie des tonnes d’infos en téléchargement libre : verdeterreprod.fr
- Lemieux, G. & Lapointe, L. (1986). Le bois raméal fragmenté et son impact sur la fertilité des sols. Université Laval.
- The Role of Lignin in Soil Organic Matter Formation and Stability – Journal of Soil Science, 2018.
- Fungal Decomposition of Lignin and Cellulose in Soil – Soil Biology and Biochemistry, 2019.
- Effects of Wood Chips on Soil Physical Properties – Agricultural and Forest Meteorology, 2020.
- Nitrogen Immobilization and Release in Soils Amended with Organic Residues – Soil Science Society of America Journal, 2017.
- Soil pH Changes Following Application of Wood Chips – Journal of Environmental Quality, 2016.
- Impact of Ramial Chipped Wood on Vegetable Crop Yields and Water Use Efficiency – European Journal of Agronomy, 2021.
- Carbon Sequestration and Biodiversity Enhancement through Ramial Chipped Wood Application – Ecological Applications, 2022.
Nourrir la terre, c’est semer un futur où abondance rime avec respect du vivant.
Pensez sauvage, et laissez la nature reprendre ses droits !