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Le fraisier... comment le multiplier

Pourquoi on utilise les stolons pour multiplier les fraisiers plutôt que les graines.

Le fraisier est une plante fascinante qui pousse dans nos jardins depuis des siècles. Mais savez-vous d’où vient vraiment la grosse fraise que vous dégustez ? Et pourquoi on ne la multiplie jamais par graines ? Contrairement à la plupart des plantes de notre potager, le fraisier à gros fruits suit des règles très particulières. Il en existe plusieurs espèces, créées par la nature (et un peu par les humains), qui ne se croisent pas entre elles, et qui ne se reproduisent surtout pas de la même façon.

Les différentes espèces de fraisiers

La fraise des bois

Pour bien comprendre le fraisier, il faut connaître la fraise des bois (Fragaria vesca). C’est elle la vraie ancêtre sauvage qu’on trouve encore aujourd’hui en forêt. Elle a deux jeux de chromosomes (c’est ce qu’on appelle être "diploïde?" pensez à des paires de gènes). Ses fruits sont minuscules comparé aux fraises du commerce, mais savoureux.

Il existe aussi les fraises alpines ou fraises des bois cultivées, qui sont des variantes améliorées de Fragaria vesca. Elles gardent la même structure génétique, ce qui signifie qu’on peut les multiplier facilement par graines et qu’elles restent fidèles à leur parent.

D’autres espèces diploïdes existent, comme celles du Japon (Fragaria iinumae) ou d’Asie, mais elles sont moins connues.

Comment est née la grosse fraise ?

C’est une histoire incroyable ! Il y a très longtemps (des millions d’années en réalité), la nature a créé progressivement des fraisiers de plus en plus complexes, en les croisant entre eux.

​Au départ, deux petites espèces sauvages se sont croisées naturellement, créant une plante avec 4 jeux de chromosomes (au lieu de 2). On appelle ça une tétraploïde?. Imaginez que vous aviez des paires de gènes, et voilà que d’un coup vous en aviez 4 exemplaires !

Puis, cette tétraploïde a croisé une autre espèce, donnant naissance à une hexaploïde (6 jeux de chromosomes).

Finalement, il y a environ 1 million d’années, une dernière fusion a créé l’octaploïde (8 jeux de chromosomes !). C’est ce fameux Fragaria ananassa, le fraisier cultivé moderne.

​ce fraisier octaploïde n’existait qu’en Amérique du Sud et en Amérique du Nord, naturellement, sous deux formes différentes.

La création du fraisier moderne (18e siècle)

Les humains ne se sont vraiment intéressés aux fraisiers géantes qu’au 18ème siècle. Voilà comment ça s’est passé :

​Un espion français ramène d’Amérique du Sud (du Chili, plus précisément) une fraise énorme, Fragaria chiloensis. C’est une fraise goûtue avec des gros fruits, mais qui n’aime pas du tout le climat froid de la France et de l’Europe.

Pendant ce temps, les Anglais cultivaient Fragaria virginiana, une fraise d’Amérique du Nord. Elle est moins grosse, mais elle adore le froid européen et elle est très productive.

L’idée de génie : croiser les deux !

En 1714, ce croisement commence sérieusement. L’hybride résultant est Fragaria × ananassa (le "×" signifie que c’est un hybride). Ce fraisier combine la taille généreuse de chiloensis et la saveur de virginiana. Son nom "ananassa" vient même de son léger goût d’ananas !

Depuis, toutes les fraises à gros fruits que vous mangez descendent de cet hybride original.

un pied de fraise

Pourquoi les fraisiers ne peuvent pas se croiser entre eux ?


Bonne nouvelle et mauvaise nouvelle. La bonne : cet isolement génétique a sauvé les variétés cultivées. La mauvaise : c’est très compliqué à expliquer !

Le problème des "niveaux" génétiques

  • Imaginez deux couples de danseurs. Ils dansent parfaitement ensemble - chaque danseur sait où aller et avec qui danser.
  • Maintenant, ajoutez 6 danseurs supplémentaires. Le chaos ! Plus personne ne sait qui doit danser avec qui.
  • C’est exactement ce qui se passe avec les fraisiers.

​La fraise des bois (diploïde, 14 chromosomes) c’est un couple.
Le fraisier cultivé (octaploïde, 56 chromosomes) c’est 4 couples superposés, mais pas tous de la même danse !

Quand on essaie de les croiser, les chromosomes ne trouvent pas leurs "partenaires" pendant la reproduction. Le résultat ? Des graines qui ne germent pas, ou des plantes complètement stériles (qui ne peuvent pas se reproduire du tout).
Les barrières invisibles

Il y a aussi une barrière avant même la fécondation. Le pollen du fraisier diploïde ne "reconnaît" pas vraiment le pistil? du fraisier octaploïde. C’est comme si deux espèces parlaient des langues tellement différentes qu’elles ne pourraient jamais se comprendre.

​Même si par miracle un pollen réussit à atteindre l’ovule, les gamètes (les cellules reproductrices) sont incompatibles. Elles ont trop peu ou trop de chromosomes pour se combiner correctement.

L’exception qui confirme la règle

Il existe quelques rares croisements réussis entre diploïdes et octaploïdes, mais seulement quand :

  • Les deux plantes produisent accidentellement des gamètes non-réduits (avec le nombre complet de chromosomes au lieu de la moitié)
  • Ou quand les scientifiques utilisent de la colchicine (une drogue chimique) pour doubler les chromosomes
  • Ces exceptions sont tellement rares qu’on les ignore généralement.

Les différentes espèces de fraisiers restent bien isolées les unes des autres. C’est un mur génétique naturel.

Pourquoi ne pas multiplier les gros fraisiers par graines ?


Voilà la grande question ! Si on peut planter les graines de tomate, pourquoi pas celles de fraise ?

La réponse tient en deux mots : hétérozygotie extrême.

Qu’est-ce que l’hétérozygotie ?

  • Chaque gène a deux versions (des allèles), une venant de la mère, une du père.
  • Si vous avez le gène "A" de maman et le gène "A" de papa, vous êtes homozygote pour ce trait (AA). Vous le transmettrez sans surprise à vos enfants.
  • Si vous avez le gène "A" de maman et le gène "a" de papa, vous êtes hétérozygote (Aa). Vous pouvez transmettre soit "A" soit "a", au hasard !

Le fraisier cultivé : un cas extrême

Le fraisier cultivé a 8 copies de chaque groupe de gènes (octaploïde = 8 jeux). Mais ces 8 copies ne sont pas toutes identiques - elles viennent d’origines différentes (mélange de chiloensis et virginiana, plus d’autres ancêtres).

​Résultat : entre 31% et 87% de son génome est hétérozygote selon la variété. C’est énorme !

La ségrégation génétique : le chaos de la reproduction

Quand vous semez les graines d’un fraisier cultivé, il se passe quelque chose de dingue.

  • Prenons un caractère simple : la taille du fruit. Le parent a hérité d’un mélange fou de petits gènes de fraise des bois et de gros gènes de fraisier sud-américain. Tous ces gènes coexistent dans le fruit de 20 grammes que vous récoltez.
  • Quand ce fruit se reproduit sexuellement (via les graines), c’est comme si on brassait toutes les cartes. Chaque graine obtient une combinaison différente de ces gènes.

Résultat : vous obtenez :

  1. Certains plants avec des mini-fraises (retour aux ancêtres sauvages)
  2. Certains plants très vigoureux
  3. Certains plants faibles
  4. Certains plants avec des fruits mal formés
  5. Peut-être un plant avec de beaux gros fruits... mais ce ne sera jamais exactement comme la fraise-mère

C’est un vrai jeu de loterie

Imaginez que vos gènes pour la taille du fruit sont notés : AaBbCcDdEe (et en réalité c’est bien pire, avec des centaines de gènes impliqués). Vos graines pourraient être :

  1. AABBCCDDEE (très gros fruit)
  2. aabbccddee (très petit fruit)
  3. AabbCcDdEe (bizarre)
  4. AAbbCCDdee (encore plus bizarre)
  5. ... et ainsi de suite

Il y a littéralement des milliards de combinaisons possibles ! Chaque plant sera unique et différent de ses parents.

Les avantages de la multiplication végétative

Par contre, si vous prenez un stolon (un petit plant qui pousse à la base de votre fraisier), vous créez un clone. C’est une copie génétique exacte du parent.

  • Pourquoi ? Parce que ce nouveau plant n’a pas résulté d’une rencontre entre un pollen et un ovule. Il a été créé par division cellulaire simple - les mêmes gènes copiés tels quels.
  • C’est comme faire une photocopie : vous obtenez le même résultat, à l’identique.

Que se passe-t-il si on ressème vraiment des graines de fraisier ?


Mettons que vous êtes curieux et vous décidez d’ignorer tous les conseils et de semer les graines de vos belles fraises Gariguette ou Mara des Bois. Que va-t-il se passer ?

Le retour du type sauvage

Dans environ 80% des cas, vous allez récolter des petites fraises, très ressemblantes aux fraises des bois. Pourquoi ? Parce que les gènes de la fraise sauvage (l’ancêtre diploïde minuscule) sont souvent dominants. Ils reprennent le dessus quand vous les mélangez.

​C’est comme si la nature "oubliait" les améliorations humaines et revenait à l’état sauvage d’origine.

Une variabilité folle

Vos 100 plants de fraisier issus de graines seront tous différents. Vous allez observer :

  1. Certains fruits roses et minuscules
  2. Certains fruits très rouges mais petit
  3. Certains fruits mal formés, pointus ou bosselés
  4. Certains plants avec peu de fruits
  5. Certains plants super productifs mais à petits fruits
  6. Peut-être 1 ou 2 plants décents, mais jamais identiques au parent
  • La qualité du goût sera très variable
  • La fermeté du fruit change énormément
  • Aucun ne ressemblera au parent

C’est le point crucial : vous ne retrouverez jamais votre fraise originale. Même pas proche. Ceci dit si vous êtes curieux ou/et patient il est possible d’avoir avec beaucoup de chance un pied remarquable que vous pourrez alors multipliez par stolons.(ce jour là tenez-nous au courant !) il vous faudra beaucoup de place dans au jardin !

C’est pour ça que les producteurs de fraises ne produisent jamais par graines. La première année, ils ont du charabia génétique. La deuxième année, s’ils ressèment, c’est encore pire.

deux fraises des bois

L’exception : la fraise des bois et les fraises alpines


Bonne nouvelle ! Il existe une exception à ce cauchemar génétique.

Pourquoi les fraises des bois marchent

  • La fraise des bois (Fragaria vesca) et ses cousines les fraises alpines sont diploïdes (2 jeux de chromosomes). Elles sont beaucoup plus homozygotes (leurs gènes se trouvent en paires identiques).
  • ​Quand elles se reproduisent sexuellement, elles produisent des graines qui restent fidèles au parent. Pas de grand brassage génétique, pas de surprise terrible.
  • Vous semez les graines et vous obtenez des fraises des bois identiques (ou presque), vous pouvez refaire la même chose l’année suivante.

Comment multiplier les fraisiers à gros fruits en pratique

Puisqu’on ne peut pas utiliser les graines, on fait autrement. C’est simple et ça marche depuis des siècles.

  • Le marcottage des stolons (la méthode classique) : C’est la manière traditionnelle et efficace. En été (à partir de juillet), votre pied mère de fraisier produit des "tiges rampantes" qu’on appelle des stolons. À intervalle régulier sur ces stolons, de petits plants se forment naturellement. Chaque petit plant a déjà des feuilles minuscules et même parfois une petite racine.
  • Le processus du marcottage : Ne gardez que le premier petit plant sur chaque stolon. C’est généralement le plus vigoureux. Versez du terreau dans des godets individuels. Appuyez doucement le petit plant (plantule) du stolon dans le terreau, sans la séparer du plant mère. Maintenez le contact entre la plantule et le terreau avec une petite pierre ou une tige. Gardez le terreau humide mais pas détrempé. Après 3-4 semaines, le petit plant développe ses propres racines. Vous pouvez vérifier en le levant légèrement - s’il résiste, c’est bon signe ! Coupez le stolon qui relie le petit plant au pied mère. Voilà ! Vous avez un nouveau plant indépendant. Plantez-le en automne ou en printemps dans un bon terreau enrichi de compost.


Vous n’avez pas mélangé les gènes. Le petit plant est né par division cellulaire simple, en restant attaché au plant mère. C’est une copie conforme , un clone.

Donc..

  • Le fraisier est une plante extraordinaire, mais génétiquement très différente des autres légumes du jardin.
  • Le point clé à retenir : On ne multiplie jamais les belles grosses fraises par graines parce que le chaos génétique les ferait dégénérer rapidement. On utilise les stolons, qui sont des clones - des copies exactes du plant mère.
  • Si vous essayez quand même de semer les graines de votre Gariguette... vous allez découvrir les fraises des bois ! Ce ne sera pas mauvais, juste complètement différent.
  • Pour les fraises alpines, c’est l’inverse : semez les graines sans peur, vous obtiendrez exactement ce que vous attendez.

Portfolio

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